Les lois et réformes
Création du franc Germinal
Après la Révolution, deux jalons essentiels conduisent jusqu'aux lois de germinal de l'an XI :
- - l'adoption du système métrique et le système décimal appliqué à la monnaie, en 1793
- - puis l'instauration du franc comme unité monétaire de la République le 28 thermidor an III (15 août 1795).
Établies avec prudence et souplesse,
elles font suite à de nombreux débats, passionnés, souvent
contradictoires, inventifs, qui touchent à des questions essentielles
de la monnaie en France : faut-il ou non maintenir le rapport de l'or
à l'argent établi en 1785 par Calonne, ministre de Louis XVI
? Quelles sont les mesures à prendre pour éviter que circulent
dans le pays, en même temps que les francs, des monnaies de l'ancien
système royal, des monnaies étrangères ou encore de
fausses pièces de bas argent ou de billon qui sont nombreuses à
être fabriquées à l'étranger pour être
répandues sur les marchés français ? Faut-il ou non
procéder à une refonte des monnaies d'or et d'argent ?
établir le monométallisme argent ? Des hommes politiques,
économistes, fonctionnaires des Finances sont associés aux
débats comme Basterrèche, auteur d'un Essai sur les Monnaies
dans lequel il affirme la suprématie de l'argent, ou Des Rotours,
ancien premier commis des monnaies qui réfute cette proposition. Trois
années seront nécessaires à Bonaparte, Premier consul, et
à son ministre des Finances, Gaudin, pour faire aboutir les
différents projets. Bonaparte attend aussi d'avoir obtenu la paix
à l'intérieur et négocié la paix à
l'extérieur pour faire voter cette loi.
La première loi, la loi du 7-17 germinal an XI (28 mars-7 avril 1803), comporte vingt-deux articles précédés d'une disposition générale, très brève : « cinq grammes d'argent, au titre de neuf dixième de fin, constituent l'unité monétaire qui conserve le nom de franc ». Elle réglemente la fabrication des monnaies et les conditions de leur fabrication.
Elle énumère les pièces qui seront frappées, ¼, ½, ¾, 1, 2 et 5 francs d'argent ; 20 et 40 francs or, précise les figures et les légendes qui figureront sur les pièces. Plusieurs principes généraux s'en dégagent :
- - L'argent est choisi comme étalon, l'or lui étant complètement subordonné. Cette invariabilité de l'argent par rapport à l'or est une garantie pour les transactions commerciales. Le lien de la monnaie avec le système métrique est confirmé. L'unité monétaire, qui conserve le nom de franc, a un titre et un poids immuable. Comme le précisait déjà la loi de thermidor an III, le titre de la monnaie sera neuf parties de ce métal pur et une partie d'alliage ; la pièce de 1 F sera à la taille de 5 g.
- - La loi confirme l'abandon de la notion de monnaie de compte utilisée sous la Royauté, qui était une valeur abstraite (la livre tournois) représentée par une quantité de métal variable au gré du souverain. Désormais, la monnaie de compte et la monnaie réelle coïncident. Fait notoire, la valeur de la monnaie ne dépend plus de la volonté du législateur.
- - La loi fixe le rapport entre l'or
et l'argent à 15,5, soit 4,5 g d'argent pour 0,29 g
d'or.
Ce rapport, s'il n'est pas clairement inscrit dans le texte de loi, se situe en continuité avec la grande réforme établie en 1785 par Calonne, que ses détracteurs n'eurent de cesse de remettre en cause pendant les débuts de la République et jusqu'à la préparation des lois de germinal an XI. Il est précisé qu'en cas de variation de l'or par rapport à l'argent, une refonte pourra être décidée, mais que seul l'or sera refondu. - - Cette loi, qui se veut libérale, fait disparaître les pénalités contre le triage entre les bonnes et les mauvaises monnaies, pratiqué à grande échelle par les marchands et les usuriers. De même le billonnage et la fonte des monnaies ne sont pas sanctionnés.
Tout droit de seigneuriage, taxe perçue
sur les fabrications, disparaît, ce qui aboutit en particulier à
une réévaluation de la monnaie dans les opérations de
change.
La loi cherche à accroître l'exactitude des
fabrications en réduisant les tolérances de titre et de poids.
Pour limiter les risques d'erreur, les espèces fabriquées en
province sont vérifiées dans les ateliers monétaires
parisiens, sous le contrôle de l'administration centrale. La loi de
germinal an XI ne cherche pas à résoudre tous les
problèmes en même temps. Elle tente pourtant de donner une
certaine confiance à l'économie, de permettre que les
nouvelles monnaies l'emportent peu à peu sur les anciennes. Autre
fait significatif, en créant le franc germinal, Bonaparte impose une
nouvelle symbolique sur les monnaies françaises.
Sont abandonnées les figures allégoriques des débuts de la République, Hercule, symbolisant le Peuple entouré par la Liberté et l'Égalité, ou encore le buste de la Liberté coiffée d'un bonnet phrygien. Un seul symbole subsiste à l'avers des monnaies : la tête nue de Bonaparte, de profil, entourée de la légende BONAPARTE PREMIER CONSUL, tandis qu'au revers figure dans une couronne d'olivier la valeur faciale de la pièce, entourée de la légende RÉPUBLIQUE FRANÇAISE. Sur les premiers francs de germinal an XI, le portrait de Bonaparte est signé par Pierre-Joseph Tiolier, que le Premier consul vient de nommer graveur général, en remplacement d'Augustin Dupré,créateur des figures monétaires des débuts de la République. Par la suite Jean-Pierre Droz et Nicolas Brenet, choisis par concours, représenteront le Consul puis l'Empereur, respectivement pour les monnaies d'or et d'argent.
Après la loi du 7-17 germinal, une deuxième loi, complémentaire, est promulguée le 24 germinal (14 avril 1803). Elle se présente comme une tentative pour favoriser la refonte des monnaies de la royauté. La loi précise : les pièces d'or de 24 livres et de 48 livres, et les écus d'argent de 6 livres, rognés et altérés, ne seront plus admis dans les paiements qu'au poids. Ils seront portés dans les hôtels des monnaies pour y être refondus sans aucune retenue de frais de fabrication.
Le 24 germinal an XI, une autre loi est publiée , la première loi relative à la Banque de France. Elle précise que cette association privée, formée à Paris en 1800, aura le privilège exclusif d'émettre les billets de banque . La plus petite coupure prévue est de 500 francs. Sans établir de lien direct entre ces lois, il ne fait pas de doute qu'elles s'articulent l'une avec l'autre, Bonaparte mettant en place l'usage du billet en même temps qu'il cherche à assainir la circulation des monnaies métalliques. Donnée fondamentale, les billets sont convertibles en or et cette convertibilité se maintiendra pendant plus d'un siècle.
Franc Poincaré

Aprés la première guerre mondiale, une forte hausse de prix a érodé le pouvoir d'achat de la monnaie et le pays est lourdement endetté. Dès 1919, la solidarité financière qui s'était établie entre les alliés cesse et il devient clair que la France ne bénéficiera d'aucune remise sur ses dettes de guerre. L'illusion que "l'Allemagne paiera" dispense des sacrifices nécessaires à un assainissement des finances publiques. Mais la mauvaise volonté allemande à payer puis l'effondrement du mark montrent vite la vanité d'un tel espoir.
Le 25 juin 1928, le franc Poincaré est officiellement défini à 65,5 milligrammes d'or au titre de 900 millièmes. Comparé au franc germinal la dévaluation approche les 80% : c'est "le franc à quatre sous".
Conséquence de cette réforme, on procède au retrait des monnaies d'or et d'argent.
Le nouveau franc
Le 27 décembre 1958, une ordonnance décide que "à compter d'une date qui sera fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 1960, il sera créé une nouvelle unité monétaire française dont la valeur sera égale à cent francs". La nouvelle unité est "désignée par le terme nouveau franc".
Cette réforme monétaire est la partie la plus manifeste pour le public d'un programme ambitieux, préparé par Jacques Rueff, qui prône l'assainissement budgétaire pour mettre fin à l'inflation et promouvoir la rénovation économique et financière du pays. La valeur externe du franc est fixée à 1,8 milligramme d'or fin (soit 180 milligrammes pour un nouveau franc).
La fin du franc
En 1992, le traité de Maastricht sur l'Union européenne instaure l'Union économique et monétaire et établit les fondements de la monnaie unique.
En décembre 1995, les 15 Etats membres de l'Union européenne adoptent le nom de la monnaie unique : l'euro. Ils fixent également les conditions, le calendrier et les modalités de passage à cette monnaie unique.
Ce passage à la monnaie unique se fait en deux temps :
- le 1er janvier 1999, l'euro devient la monnaie unique de onze pays européens et les taux de change des monnaies participantes sont fixés de manière irrévocable (1 euro = 6,55957 francs français) ;
- le 1er janvier 2002, les billets et pièces en euros sont mis en circulation.
A partir du 1er juillet 2001, les banques et les établissements financiers fournissent des chéquiers en euros à leurs clients.
En décembre 2001, les commerçants reçoivent des fonds de caisse en euros pour être en mesure, dès le 1er janvier 2002 de rendre la monnaie en euros. Le 15 décembre 2001, les banques et les bureaux de poste proposent des sachets contenant 40 pièces en euros vendus 100 francs (15,24 euros). Fin décembre 2001, les banques et la Poste adaptent les distributeurs de billets à l'euro pour que des euros puissent être retirés dès le 1er janvier 2002.
Le 31 décembre 2001 à minuit marque l'introduction officielle des pièces et des billets en euros dans les 12 pays de la zone euro : Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, France, Grèce, Irlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas et Portugal.
Le 1er janvier 2002 : l'euro est là. Les pièces et les billets sont mis en circulation. Pour faciliter le retrait des pièces et des billets en francs, les commerçants commencent à rendre la monnaie en euros. Les paiements en chèques, virements et cartes bancaires se font uniquement en euros.
A partir du 17 février 2002, à minuit, les paiements en pièces et billets en francs ne sont plus autorisés. Jusqu'au 30 juin 2002, les pièces et billets en francs peuvent être échangés gratuitement auprès des banques, de la Poste et de la Banque de France. Après le 30 juin 2002, ces échanges pourront être effectués gratuitement au Trésor Public, à la Banque de France et à l'IEDOM, pendant 3 ans pour les pièces et pendant 10 ans pour les billets.
Source : Création du franc Germinal - Une histoire illustrée de notre monnaie